Le Beauvaisis à l’extrême est des bocages de la boutonnière du pays de Bray est pour moi un des hauts lieux du grès. Je collectionne ces magnifiques bouteilles à cidre que l’on trouve encore pour une bouchée de pain dans les « foire-à-tout » de la Normandie.
Dés que l’on descend dans la boutonnière les constructions en briques s’imposent. A La Chapelle aux pots « le musée de la poterie » évoque les souvenirs des poteries usuelles et du travail d’Auguste Delaherche. L’antiquaire du village peut encore vous vendre quelques céramiques usuelles intéressantes.
A Beauvais, une belle exposition sur les rapports de la brique et de la céramique contemporaine est installée dans l’ancienne maladrerie Saint Lazare des XII et XIII siècles.
C’est une entreprise locale, la briqueterie de Christophe et Vincent Dewulf qui emploie 16 salariés qui a soutenu le projet. Elle dispose d’une installation robuste utilisant les argiles locales et d’un four fonctionnant aux granulés de bois. C’est de ce point de vue une installation probablement en avance sur son temps. Ses produits ont la saveur d’un produit du terroir bien pensé, c'est-à-dire l’enracinement et la modernité.
La maladrerie reste un lieu improbable avec une partie réhabilitée et une autre dans son jus après des années d’abandon. La magnifique grange du XIIème siècle complètement rénovée abrite une bonne moitié des exposants sous une charpente de chênes sinueux qui semblent sortir de leur forêt moyenâgeuse. La scénographie parait un peu pauvre dans ce lieu impressionnant.. Cependant certains travaux y trouvent une place. C’est le cas d’Anne Barrès qui a travaillé avec Jean Lerat à l’école des Beaux arts de Bourges. Elle y présente des rencontres de briques surdimensionnées dont la rigueur est bien en harmonie avec l’espace. Daniel Pontoreau et Wade Saunders dans des registres différents s’élancent vers les hauteurs alors qu’Agathe Larpent occupe le sol avec intelligence.

La maison abandonnée de l’administrateur est occupée par les œuvres de Philippe Goderridge et Coralie Courbet. Le mur reconstitué par cette dernière rappelle que la brique vernissée étaient déjà employée pour le palais de Darius….
Les roues de Rudy Toulotte et Véronique Delplace s’insèrent bien dans le verger. Elles prouvent que la brique et les verts de la nature sont faits pour s’entendre.
Le travail d’Andrew Burton au sein d’une grande prairie est un vrai hymne à la construction. L’enceinte austère abrite une construction colorée pleine de charme.
On peut penser après cet itinéraire que ceux qui ont choisis de faire revivre les espaces les plus déshérités ont un mérite particulier et y trouvent une dimension poétique plus facilement.
Enfin un catalogue (15€) très intéressant où après une mise en situation par Frédéric Bodet chacun des artistes répond avec intelligence à une interview standardisée accompagne l’exposition.
On ne peut que souhaiter que ces efforts se traduisent enfin par une réappropriation accrue des ressources céramiques naturelles et intellectuelles de cette région comme cela s’est passé à La Borne et dans d’autres pôles il y a quelques dizaines d’années.
Pour finir votre tour à Beauvais allez jusqu’à la maison à la façade couverte de céramique de Charles Greber sur la route d’Abbeville et vous aurez ainsi rempli une bonne journée consacrée à la céramique en Beauvaisis !
François Lerat - 9 juillet 2011